L’ensemble des actes de procédure entrepris dans le cadre du dossier 04/RP/2017 - qui aura certainement sa place dans les annales judiciaires de notre pays-, ont clairement prouvé que les poursuites engagées contre le Sénateur Mohamed Ould Ghadda et douze de ses collègues n’ ont pas d’explication, mobile ou justification en dehors de la volonté politique déclarée de sanctionner tous ceux qui, au Sénat, ont osé voter contre la réforme constitutionnelle initiée et défendue opiniâtrement par le Pouvoir Exécutif.
Formellement fondées sur les dispositions de la loi 2016/14 relative à la lutte contre la corruption, ces poursuites et les faits leur servant prétendument de base matérielle, ne peuvent guère être dissociés du rejet par la grande majorité des Sénateurs le 17/3/2017 de telles modifications.
Aussi, se fondant pertinemment sur l’article 50 de la Constitution de la République Islamique de Mauritanie, le Collectif de défense du Sénateur Mohamed Ould Ghadda a-t-il introduit, hier, jeudi 14/7/2017, auprès de la chambre d’accusation de la Cour d’Appel de Nouakchott, une requête tendant à obtenir l’abandon de toutes les poursuites et charges retenues à l’encontre du Sénateur Mohamed Ould Ghadda et de ses douze autres collègues poursuivis comme lui dans cette affaire.
A cet égard, l’alinéa premier de l’article 50 de la Constitution dispose clairement : « Aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou des votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions ».
Cette disposition n’est que l’aménagement constitutionnel du principe fondamental, immuable de la séparation des pouvoirs, pierre angulaire de l’indépendance du Pouvoir Législatif par rapport aux deux autres : le Pouvoir Exécutif et le Pouvoir Judiciaire.
Il s’agit là d’une immunité absolue ne pouvant souffrir d’aucune exception !
Le respect et la préservation de cette immunité sont les gages de l’équilibre des pouvoirs tel que prévu et organisé par notre constitution et constitue un des principes élémentaires de l’Etat de droit. Sa violation constituerait une atteinte grave à la loi et ouvrirait la voie béante à tous les abus.
Si le Parquet qui, de droit ou de fait, n’est qu’un instrument du Pouvoir Exécutif, a crû pouvoir outrepasser sans hésitation cette disposition essentielle de la constitution et si le pôle d’instruction a suivi son réquisitoire de soit informé, il appartient, en revanche , à la Cour d’appel de rendre à ce texte tout son sens et toute sa portée ; les magistrats donneront ainsi un contenu effectif à l’indépendance du Pouvoir Judiciaire que garantissent à la fois nos valeurs islamiques, la loi fondamentale, les principes de droit, et le statut de la magistrature.
C’est pourquoi, nous nourrissons l’espoir de voir nos juridictions s’opposer par les voies de droit à cette violation de la constitution en ordonnant l’abandon immédiat des poursuites engagées abusivement contre notre client et l’ensemble de ses collègues.
En tout état de cause, nous mettons solennellement, par cet acte de procédure, les magistrats devant leur responsabilité professionnelle morale et historique.
Nouakchott, le 15 septembre 2017
Le Collectif de Défense de Mohamed Ould Ghadda -