Lutte contre le terrorisme dans le Sahel : Quand Washington refuse l’intervention des Africains

mer, 06/14/2017 - 06:28

Les Etats-Unis s’opposent fermement à un projet de résolution présenté par la France au Conseil de sécurité pour autoriser le déploiement d’une force militaire régionale G5 Sahel afin de lutter contre le terrorisme dans la zone sahélienne, a rapporté Associated Press.

La requête portée par la France devant le Conseil de sécurité pour accorder un mandat à cette force militaire n’a pas fait l’unanimité au sein de l'organe onusien, les Etats-Unis s’opposant à plusieurs points du projet de résolution ont refusé de le valider, a confié un responsable américain qui s’exprimait sous couvert d’anonymat. Si l’administration de Donald Trump soutient dans le principe cette force militaire en tant "qu’exemple potentiellement important des efforts africains pour lutter contre l’extrémisme, elle estime, toutefois, que le G5 Sahel n’a pas besoin du feu vert du Conseil de sécurité pour la déployer". "Il n'y a pas de raison impérieuse" d’accorder l’autorisation du Conseil de sécurité à cette force conformément au chapitre 7 de la charte des Nations Unies qui est militairement exécutoire, a ajouté la même source. Le responsable américain a soutenu que la force G5 Sahel devrait fonctionner sans l'approbation de l'ONU à l’instar du groupe de travail luttant contre le groupe terroriste Boko Haram dans le bassin du lac Tchad. Vendredi, l'ambassadeur d'Italie auprès de l’ONU, Sebastiano Cardi, a déclaré qu’il était "absolument important que le Conseil reconnaisse les efforts des cinq pays du Sahel, appuie leurs efforts et valide la mission". "Ce sont des pays pauvres qui ont besoin d'aide", a-t-il ajouté. Mais les Etats-Unis veulent réduire d’un (1) milliard de dollars le financement budgétaire des opérations de maintien de la paix des Nations Unies pour l'exercice budgétaire qui va commencer à partir du premier juillet prochain. Le projet de résolution ne prévoit pas de financements destinés à cette force militaire mais demande au secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, de faire un rapport au Conseil de sécurité dans les deux prochains mois sur les meilleures options de soutenir financièrement ces troupes au Sahel. Le responsable américain a précisé que son pays est "généreux" avec les cinq pays du Sahel (Mali, Burkina Faso, Mauritanie, Niger et le Tchad) et leur accorde l’assistance dont ils ont besoin pour lutter contre le terrorisme. Le projet de résolution présenté par Paris, autoriserait cette force ouest-africaine à employer "tous les moyens nécessaires" pour rétablir la paix et la sécurité dans cette région ce que Washington considère comme "un mandat trop vaste et manquant de précisions", a indiqué Associated Press. En avril dernier le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA) a autorisé le déploiement de cette force pour une période initiale de douze (12) mois renouvelable et un effectif pouvant aller jusqu'à 5.000 personnels, avec des composantes militaire, civile et de police, selon le communiqué qui a sanctionné sa réunion tenue le 13 avril dernier sur le projet de Concept d’opérations stratégique de la Force conjointe du G5 Sahel. Mais a considéré que le projet doit expliciter les relations de soutien mutuel entre la Force conjointe du G5 Sahel et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et les forces internationales en présence dans la région.

G5 du Sahel

 

Le G5 Sahel ou « G5S » est un cadre institutionnel de coordination et de suivi de la coopération régionale en matière de politiques de développement et de sécurité, créé lors d'un sommet du 15 au 17 février 2014 par cinq États du Sahel : Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad. Il s’est doté d’une convention signée le 19 décembre 2014 et le siège de son secrétariat permanent est en Mauritanie. Le poste de secrétaire permanent est confié au Niger. Il se réunit à différents niveaux dont, pour le volet militaire, au niveau des chefs d’État-major des armées. Ce cadre de coopération présente la particularité, au regard d’autres organisations,

•de lier étroitement développement économique et sécurité, les États étant « (...) persuadés de l'interdépendance des défis de la sécurité et du développement (...) » ;

•d’impliquer des États du Sahel directement menacés par les différentes organisations djihadistes de la région (AQMI, MUJAO - Al Mourabitoune, Boko Haram).

Le G5 Sahel et les organisations sous-régionales

Le G5S s’inscrit dans une forte tradition d’intégration régionale en matière de développement économique et de lutte contre le terrorisme ; toutefois les membres du G5S sont, globalement, membre de trois organisations différentes pour chaque thématique : - La Mauritanie avec le Maghreb voire le monde arabe, - Le Mali, le Burkina Faso et le Niger avec l’Afrique de l’Ouest, - Le Tchad avec l’Afrique Centrale. Ainsi, sur le plan de l’intégration économique et du développement,

•La Mauritanie est membre de l’Union du Maghreb Arabe,

•Mali, Burkina Faso et Niger sont membres de l’UEMOA et de la CEDEAO,

•Le Tchad est membre de la CEMAC.

La lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme est aussi éclatée entre trois organismes de coopération sous régionale :

•Mali, Burkina Faso et Niger sont membres du GIABA, ou Groupe Intergouvernemental d’Action contre le Blanchiment d’Argent (et le financement du terrorisme) en Afrique de l’Ouest qui regroupe 16 pays d’Afrique de l’Ouest, par ailleurs membres de la CEDEAO;

•La Mauritanie est membre de l’organisation GAFIMOA / MENAFATF avec les pays du Maghreb et du monde arabe;

•Le Tchad est membre du GABAC, une organisation dépendant de la CEMAC et créée en 2000.

Seul le CILSS – Comité Inter-État de lutte contre la sécheresse au Sahel reprend la logique territoriale du G5S, étendue à quelques pays d’Afrique de l’Ouest.

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