Toutes les constitutions des pays francophones sont inspirées voire transcrites de celle de la république française.
La constitution mauritanienne n’a pas échappé à cette réalité. L’organisation des pouvoirs publics et les procédures de prise de décision ainsi que celles relatives aux modifications ou révision de la Constitution sont quasi-identiques à celles prévues par la constitution française.
Ainsi les articles 11 et 89 de la constitution française traitent respectivement les dispositions prévues par les articles 38 et 99 de notre constitution. Le débat concernant le recours à l’article 38 par le Président mauritanien pourrait constituer, purement et simplement, une situation de jurisprudence pour comprendre son choix.
En effet, l’emploi de l’article 11 par De gaulle pour les referendums de 1962 et 1969 qui contourne le parlement avait suscité un grand débat au sein de la classe politique française sur la constitutionalité de son choix dans la mesure où la procédure de révision est uniquement et explicitement définie dans l’article 89.
Après sa consultation, le conseil constitutionnel français s’est déclaré, par décision officielle, incompétent pour se prononcer sur la constitutionnalité d'un référendum en se référant à la Constitution elle-même. François Mitterrand qui s’était fortement opposé au recours à cette procédure avait fini par y adhérer après avoir accédé à la présidence.
Bien que le débat sur l’emploi de l'article 11 pour réviser la Constitution française soit encore à l’ordre du jour chez les juristes, l'usage de l'article 11 est désormais considéré comme l'une des voies de la révision de la Constitution concurremment avec l'article 89.
C’est pour dire simplement que le cas mauritanien pourrait s’appuyer sur cette jurisprudence pour comprendre le choix du président mauritanien.
Le referendum de 1969 s’est soldé par un refus des français. De gaulle démissionne aussitôt. Son projet de régionalisation et d’ôter au Sénat son pouvoir de blocage a échoué.
En Mauritanie, les révisions proposées et solennellement, annoncées par le Président de la République le 03 mai 2016 à Néma ensuite appuyé par la signature d’un accord politique en octobre 2016 à l’issue d’un dialogue boycotté par la majeure partie de l’opposition, sont d’une ampleur considérable. Il s’agit d’une suppression d’un pouvoir législatif (le Sénat), d’un pouvoir judiciaire (Haute cour de justice), du médiateur de la République et du Haut Conseil islamique, de modifications du drapeau et de l’hymne et de créations de conseils régionaux.
Le pouvoir en place se met à l’épreuve à un moment qui semble, pour beaucoup de ses soutiens, inopportun. Le risque que les mauritaniens soient davantage influencés par une situation politique bouleversée que par le fond du projet de révision est présent voire inévitable.
En tout état de cause, le Président Aziz a déclaré : « je ne suis pas fait pour échouer… je ne suis pas fait pour démissionner ».
Les mois à venir vont nous édifier, sciemment, sur un autre épisode de la vie politique en Mauritanie qui pourrait être aussi nécessaire que complexe