Accrochée à flanc de colline, ocre et sereine
Oualata, fière et altière, telle une reine
Egrène ses souvenirs du temps des razzias
Et des litanies vespérales des zaouïas
Qui hantent la vieille ville des Messoufa
Peuplée de pieux Mhajib et nobles Chorfas
Elle se remémore l’époque ou, comme Ghana,
Elle surpassait en renommée, Damas et Sanaa
Et le temps béni des coursiers haletants d’Okba
L’âge d’or des exilés Andalous de Cortoba
De Shbilya, Saragossa et Gharnata
Et la venue des lettrés Tinwajiou et Kounta
Et lorsque Sonni’Ali dévasta Ras El Ma,
La fine fleur de la noblesse Aqit et Glagma
Barteyl et Laghlal, ainsi que les fils de Jakana
Firent de Birou, une nouvelle Medina
Un temple du savoir et de la divine foi
Révélée, jadis, au pays de Marwa et Safa
Puis vinrent d’Orient, Mbareck, Daoud et Bila
Nobles Chevaliers Makil, de la lignée de Rabi’a
Porteurs de lances, de flèches et de carquois
Qui ne surent jamais, ni comment, ni pourquoi
Leurs frères d’armes, farouches guerriers Meghafra
Se prirent soudain de passion pour Ta-Ha et Alif Lam Ra
Mars, bientôt, obscurcit le ciel de Oualata
Recouvrant le ksar du sang des vendettas
Puis le vent de la pacification, enfin, souffla
Lorsque les amis de la croix et du Walhala
Péniblement, vinrent à bout des méhalla
Sacrifiant maintes âmes pures à l’eau delà
Un demi-siècle dura la pax Gallica
Mais contraint et forcé, le blond Gaulois abdiqua
Gobineau se trompait, tout comme Zarathoustra
Il n’y a pas de race élue, sous le ciel d’Amon Ra
Le fin chasseur N’madi au nord de Oualata
Ne le cède en rien au génie Transalpin de la Traviata
Libérée, l’antique foyer Soninkara
Ou résonnaient, naguère, Azer et Bambara
Se remit aux livres saints, à l’Alfiya
Au Chifa, à Khalil, ibn Achir et ibn Teymiyya
Mais aussi au décor polychrome et à la croix
Semblable au symbole Abyssin d’Asmara
Douce amie des vents, patrie des Béni Salah
Me confieras-tu un jour ton secret, par Allah,
Est-ce le bleu de ton azur, l’air du Sahara
Si proche et si pur, ou le prestige et l’aura
De tes hommes saints ou, enfin, ta baraka
Qui te confèrent ce charme subtil et délicat ?