Spectre du troisième mandat : La fièvre de la longévité gagne e Sénégal

lun, 10/09/2017 - 08:40

Il ne manquait plus que cela. Alors que l’Etat travaille à renouer le fil du dialogue avec son opposition pour aplanir les difficultés qui sont nombreuses par les temps qui courent, voilà qu’un professeur d’Université, Babacar Guèye vient nous raconter ce qu’il tient comme réalité laquelle pourrait, si elle survenait, causer de graves troubles à notre pays.

Eh bien, cette réalité si abjecte, c’est le spectre du troisième mandat, celui qui est à la base de tous les conflits dans la plupart des pays africains.

Voici ce que dit le Professeur, invité du Grand Jury sur la Rfm : « Quelque chose a été oublié lorsqu’on a rédigé la constitution. On a du oublier de prévoir des dispositions transitoires qu’il fallait ajouter pour prévoir que le mandat en cours, celui de 2012-2019 du président Sall, fait partie du décompte des deux mandats que le président peut avoir. Le mandat en cours, si nous appliquons la constitution à la lettre, on peut considérer qu’il ne fait pas partie du décompte. Ce qui fait que le président Macky Sall en 2024 peut briguer un mandat comme l’avait fait le président Wade ». Exactement comme du temps de Wade où les arguments différaient en fonction des prises de position de l’armada des juristes mobilisés par un camp ou par un autre.

Mieux, le Président Sall a fait partie de ceux qui avaient partagé les positions de l’opposition de l’époque elle qui soutenait, mordicus, que « Wade n’avait pas droit à un troisième mandat ». Nous croyons ce débat bien loin derrière nous. Mais non, il a fallait que quelqu’un d’une grandeur intellectuelle incontestable revienne sur là-dessus. Malheureusement, rien n’est gratuit. Et il n’y a pas de hasard. La démarche nous semble réfléchie et ressemble fort à un ballon de sonde qui prépare ce qui pourrait s’apparenter à une forfaiture.

Car, tout le monde sait y compris les non-juristes que les Constitutions modernes consacrent les deux mandats. Le Président Sall n’a pas respecté sa promesse de campagne de réduire son mandat de 7 à 5 ans. Il est en train de faire 7 ans. Si l’on doit y ajouter un éventuel mandat de 5 ans en 2019 et à la faveur d’une réélection un autre de 5 ans, il va alors faire 17 ans au pouvoir. Entre nous, il n’y a aucun sérieux dans tout cela.

Tout le monde sait en effet que les textes de loi sont sujets à interprétations de différentes formes et que les acteurs ne sont pas toujours d’accord sur leurs sens. Cependant, le Professeur Guèye sait pertinemment que le recours aux travaux préparatoires pour bien comprendre l’esprit qui a guidé le législateur est un mode d’interprétation sûr si le corps de la loi semble être en contradiction avec ce que ce dernier a voulu instaurer comme règle.

Or, nous sommes loin de 2024. Il y a la Présidentielle de 2019 dont les résultats sont loin d’être acquis d’avance en tout cas pour les esprits simples que nous sommes.

Faire des projections sur 2024 et ‘’permettre’’ au Président Sall de faire un troisième mandat pour un spécialiste qui connait l’esprit du Constituant me semble relever d’une mauvaise foi.

Certes les avis techniques peuvent heurter du fait de leur scientificité mais, en l’espèce, nous sommes loin de croire en l’innocence du professeur.

Ces avis dangereux et attentatoire à l’ordre et à la sécurité publique, on les garde pour soi d’autant plus que, personne ne semble s’intéresser à la question. A moins que, discrètement, un plan ne soit ourdi pour des objectifs inavouables.

En tout état de cause, les populations africaines y compris celles de la Rdc, de la Guinée qui soupçonnent le manège et bien d’autres pays comme la Mauritanie savent que si elles ne font rien, leurs Présidents pourraient tenter d’avoir un troisième mandat, ne serait-ce que par référendum.

Dans le cas du Sénégal, le Professeur Guèye est en train de dire au Président Sall qu’il n’aura même pas besoin d’un référendum, « la Constitution le permet ».

Alors, c’est à Macky de se hisser au-dessus de la mêlé en respectant son serment, ses promesses de campagne, ses compatriotes. Car, ici, dans notre pays, tout, y compris le meurtre, se justifie. Quel que soit ce que vous aurez fait et le caractère ignoble de votre acte, vous trouverez toujours un théoricien capable de le justifier. Mais cela ne doit pas encourager l’insensé. Car, ce serait insensé pour tout président sénégalais de tenter de faire un troisième tour. Parce que tout simplement, les Sénégalais n’en veulent pas conformément à l’esprit de la Constitution.

 

Assane Samb/Rewmi quotidien

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